Hymne évoque la passion de Lydie Salvayre pour le guitariste Jimi Hendrix, une légende
vivante. Et c'est plutot très réussi. Elle prend comme point de départ l'interprétation de Star spangled banner (l'hymne américain) lors du festival de Woodstock, le 18 aout 1969.
Une bonne idée, ma foi car elle arrive à partir de cet hymne à nous dépeindre un portrait du musicien de
génie, aussi réaliste qu'onirique car Jimi Hendrix est une légende. Ainsi, elle s'éloigne peu du mythe tout en nous livrant quelques détails sur l'artiste, certes déja connu des amateurs de bon
rock, mais détails au combien passionnant quand il s'agit d'évoquer tous les travers de notre société.
Je fais partie du lot de jeunes gens, qui bien que n'étant pas née en 1969, je connais l'histoire de Woodstock, j'en ai
vu des extraits, (dont celui ci que je viens de glisser) sans avoir vu la totalité de ce film, que c'est pour moi plus qu'une anthologie, c'est un moment musical comme il n'en existera plus
jamais.
Que bien sur j'avais déja écouté cette version d' Hendrix, cette version de l'hymne américain, bien
retouchée et qui résonne à merveille à l'oreille, et qui lui valut aussi d'etre menacé lors d'un concert par un policier si peu enclin à entendre un nègre jouer ce qui représentait dans son
esprit tout ce que l'Amérique a de plus pur, de plus blanc. J'en profite pour préciser que l'une des mes chansons préférées est All along the watchtower ...
Alors, Lydie Salvayre ne se prive pas, elle nous raconte comment ce jeune gamin de sang mélé, issue de
cultures aussi différentes que celles des indiens cherokee, irlandaise, noire s'est trouvé dans l'expression la plus universelle celle de la musique, que jouer de la guitare fut sa seule raison
de grandir, et d'exister, puis de survivre. Elle dépeint admirablement son talent, les heures passées à jouer, son oreille musical car il ne savait pas lire une partition et reproduisait à
l'oreille les sons qu'il écoutait ou enregistrait lors de concerts d'autres artistes (Buddy Guy), sa passion pour le jazz était infinie, et ensuite cette manière qu'il a eu de s'aproprier sa
manière féline, quasi sauvage de jouer car Hendrix savait que cette façon de jouer n'avait pas de prix, il jouait ce qu'il était. Exilé à New York, il n'arrive pas à convaincre, il joue dans les
clubs, jusqu'au jour ou il est repéré. Il part en Angletterre, et de là en quelques mois il va dévenir une légende du rock, trop vite surement.
Il sera difficile à égaler, indétronable, unique et ce qui rend son jeu de musique si intemporel tant
il véhicule de belles émotions, des pensées justes, simples et capables de fédérer les esprits et les coeurs.
Et mystérieusement il ne put appréhender le monde du star système, car là aussi Lydie Salvayre développe
une grande notion celle de l'universalité de l'artiste, comme si cette part de créativité en l'artiste qui lui est propre n'est pas moneyable et c'est ce qui rend l'artiste si
bon, si vrai.
En cela sa fiction m'a beaucoup plu, elle dépasse le cap de l'anecdoctique, de la légende, certes
elle avoue ne pas etre objective se laissant emporter par sa passion excessive pour Hendrix, peut-on lui reprocher ??? Pas du tout, elle démontre le cheminement intérieur d'un
homme en totale opposition avec le monde dans lequel il vivait, qu'au dela de sa passion cet homme avait éprouvé la haine, celle transmise par d'autres qui le haissaient pour ce qu'il
était et que cela a nourrit sa légende, celle qui l'a conduite à intégrer ce club si sélécte des 27.
Jimi Hendrix était un musicien et non un homme publique, un gratteur de guitare avec ses longs
doigts fins, avec ses felures d'homme, qu'il exprimait dans son jeu. Il était noir dans un pays ou la ségrégation était de mise et violente, il jouait pour dénoncer la guerre au
Vietnam, il ne fut pas le seul d'ailleurs et pas pour le business, le succès.
Parce que Lydie Salvayre laisse l'homme spéctacle en second plan, au profit du musicien humain elle
convainc haut la main sur ce roman. Certes, de bonnes références musicales, pourtant le lecteur peu amateur de culture rock, trouvera une écriture ingénieuse et ne
sera pas assomé par ce portrait. Pour cela je fais plutot confiance au talent de Philippe Manoeuvre, pour etre assomé par les termes techniques et toute l'ambiance mythique du
moment ...
Parce que The Jimi Hendrix experienced vaut un petit détour, parce que les tenues vintage d'Hendrix ont
surement inspiré d'autres artistes, parce que n'est pas une légende qui veut, parce que meme si un artiste ne peut pas révolutionner le monde, le changer, il donne ce qu'il a et c'est déja
l'essentiel.